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ANTHOLOGIE DU XIXe SIÈCLE.

distance et que les palombes s’avancent gravement d’un pas de douairière pour becqueter la miette de pain des enfants, eux, les moineaux, n’y mettent pas tant de cérémonie. » C’est cette familiarité de ton et cette grâce de style qui font l’originalité de Jacques Normand et lui assignent une des meilleures places parmi les poètes vraiment français de notre temps.

Les œuvres de Jacques Normand ont été éditées par M. Calmann-Lévy.

Paul Mariéton.


LA GERVAISE

Au petit port normand l’allégresse était grande.

C’est qu’ils sont signalés, les revenants d’Islande,
Les pêcheurs du pays partis depuis longtemps ;
C’est que malgré le flot, le vent et les gros temps,
On dit que nul ne manque à l’appel ; et l’on pense
Au bonheur du retour après la triste absence,
Au fils que l’on revoit, à l’époux qui, ce soir,
Au foyer, près de vous enfin viendra s’asseoir ;
Qui va vous rapporter de sa course lointaine
L’argent qu’on enfouit dans le vieux bas de laine,
Et tous ces beaux récits qu’on écoute en tremblant,
A l’heure du souper, quand le linge bien blanc
Resplendit sur la table, et qu’aux fenêtres closes
Le sombre vent d’hiver met ses plaintes moroses.

Ô bonheur ineffable et tendre du retour !
Ils seront là ce soir...
                               Et tout le long du jour,