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ADAM ET ÈVE

abaissant leurs pieds blancs, foulaient les Heurs, comme en une image des vendanges. Il était nu ; une souple tunique volait au­ tour d’elle ; et pareils à des grappes tombées des corbeilles, Abel et Stella dormaient sur l’herbe, dans le vent de leur danse. Attendris par la mélodie, l’âne et la vache gravement arrivaient l’un et l’autre, d’une langue fra­ ternelle se léchaient à travers le poil épais. Ces allégresses champêtres s’accordaient au silencieux paysage, aux clartés naissantes de la lune, aux molles langueurs d’une nuit d’été. Et Eve ni moi ne nous cachions notre désir. Elle venait sous les arbres et elle me prodiguait son bel amour charnel. Elle me donnait sa chère substance lascive, la pulpe et le moût ardents de son corps. La chair ingénue s’unit à la chair dans une si ineffable communion que c’est comme le par­ tage à deux du pain de la vie et qu’il vient aux lèvres un petit spasme éperdu où bégaie et tressaille toute l’humanité enfantine du monde. Moi alors je croyais connaître le sens profond du mystère d’hymen ; je versais la