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tendre pleurer et gémir. La pluie dit des choses tendres au cœur. Or, le soir étant venu comme un homme qui tousse avec les charpies de la pluie sur son mal, je dis en riant à l’enfant : « Je n’irai pas dans la forêt cette nuit ». J’évitais de la regarder comme si cette parole eût été ambiguë. Je n’aurais pas dit autrement : « Quelqu’un cette nuit frappera à ta porte ». Et puis, devant ses yeux limpides, il me resta une gêne d’avoir ri. Elle me répondit comme une probe servante : « J’étendrai des fougères fraîches sur le carreau ». Elle me dit cela simplement avec son cœur droit ; cependant j’aurais voulu trouver un sens caché à ses paroles.

Bonne nuit, Janille ! Dors en paix ! Cette fois, je la regardai timidement. Elle ne baissa pas les yeux et monta devant moi, en disant aussi : bonne nuit ! L’odeur des fougères m’assoupit. Mes paupières se fermèrent au crépitement monotone de la pluie sur les feuilles. M’étant réveillé vers minuit, tout de suite je songeai qu’elle était là demi-nue avec l’odeur vierge et chaude de son corps. Mon cœur bat-