Page:Lemonnier - Ceux de la glèbe, 1889.djvu/57

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

ces germes, mis en terre dans le champ nourri d’eux, c’était la possession définitive ; la fructification viendrait ensuite ; et sans répit, ils le bourraient, oubliant résolument à présent le commandement dominical dans une fureur de lui faire rendre au centuple ce qu’ils lui avaient confié de leur sueur et de leur vie. Partout, sous leur geste rythmé, vola la semence, une pluie de poussières blondes et grises qui s’abattait en long, en large ; et dans les soirs, ils marchaient, très grands, par arpentées régulières, comme va le faucheur en ses andains.

Le champ filait droit devant la maison, resserré entre des emblavures sur un espace de trente ares vingt-huit centiares. À gauche, un vieil orme marquait la limite ; de l’autre côté, des poiriers avaient poussé derrière une haie ; et à l’extrémité, une boulbène s’étendait où, à Pâques, s’installèrent des briquetiers. Tout de suite le Forgeu avait conçu une suspicion à l’égard de l’orme et des poiriers ; là-dessous, selon les temps, la terre demeurait ou trop sèche ou trop crue ;