Page:Lemonnier - Félicien Rops, l’homme et l’artiste.djvu/90

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de mouvement d’une grandeur épique ; elles vous font venir à la pensée les paroles de Barbey d’Aurevilly : « L’épique est possible dans tous les sujets, soit qu’il chante le combat à coups de bâton du bouvier dans un cabaret, ou la rêverie d’une buandière battant son linge au bord du lavoir ! Et cela, sans avoir besoin de l’histoire, quand ce bouvier inconnu ne serait pas le Rob-Roy de Walter Scott et cette buandière ignorée, la Nausicaa du vieil Homère ! »

À un autre il dit : « J’ai fureté dans les boudoirs étrangers pour y découvrir les finesses mystérieuses de la vie de Paris et le hasard des poses heureuses ». Par-dessus tout, il a l’entêtement de vouloir peindre les scènes et les types de son XIXe siècle… « L’amour des jouissances brutales, les préoccupations d’argent, les intérêts mesquins ont collé sur la plupart des faces de nos contemporains un masque sinistre où l’instinct de la perversité, dont parle Edgar Poé, se lit en lettres majuscules ; tout cela me semble assez amusant et assez caractérisé pour que les artistes de bonne volonté tâchent de rendre la physionomie de leur temps. »

Un coin de la philosophie de son œuvre se découvre déjà à travers ces aspirations, en apparence contradictoires avec les badinages galants où il prodigua le billon de son grand art d’humanité violente. C’est, en attendant celui-ci, l’amusement d’un esprit qui n’a pas perdu le goût du rire et qui le retrouve dans les drôleries de l’amour. Il purge ce qui lui reste de sa vieille gauloiserie et l’apparente aux jolis dessinateurs grivois du XVIIIe siècle. Mais les chemises, en s’envolant, découvrent des bas que noue une jarretière toute moderne : ils sont bien de son siècle, ces petits péchés vivants aux mines délurées et que pressentit, sans les connaître, l’art des Boucher, des Fragonard, des Eisen et des Moreau. Aux bosquets d’Amathonte et de Paphos ont succédé le cinq à six de la garçonnière, le divan du cabinet particulier et le gros tapage libertin de la maison chaude. Ce ne sera, du reste, qu’un passage : de