Page:Lemonnier - Noëls flamands, 1887.djvu/244

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— Piet, je vous donne ma Truitje et j’espère que vous ferez bon ménage. Mais il faut que je voie avant tout si vous ferez bon ménage avec ma pratique et si vous méritez que je vous laisse ma boutique entre les nains. Écoutez, Piet : j’ai dans ma boutique un bon morceau de cuir laqué blanc. Je vous le donnerai afin que vous en fassiez une paire de souliers pour le pied l’un petit enfant. Nous saurons alors ce dont vous êtes capable, Piet, et vous mettrez plus tard devant la fenêtre les petits souliers sous un globe pour qu’on voie que c’est Piet Snip qui les a faits.

— Maître, dit Piet, je le ferai.

Alors Lukas Snip coula un regard oblique vers Nikker et dit :

— Et moi, je veux savoir si Truitje est habile à raccommoder les vieux effets. Oui, il faut aussi que Truitje montre ce qu’elle sait faire.

Lukas mit sa pipe sur la table et alla chercher dans l’armoire une serviette blanche nouée par les bouts, soigneusement. Il l’ouvrit et en tira une petite robe de satin enguirlandée de perles, qui avait une odeur d’encens.

Et le vieux Lukas dit :

— C’est la robe de la Sainte-Vierge. M. le curé me l’a apportée parce qu’elle est mangée des mites. Truitje remettra les perles qui manquent et reprisera les trous.

— Je le ferai, dit Truitje.

Six jours après, Piet apportait à Claes Nikker la pire de souliers ; et ils étaient doublés de satin, avec des semelles minces comme une feuille de papier.

— Piet, dit Nikker, après avoir longtemps considéré les souliers : c’est un bon ouvrage. Il n’y a que Claes Nikker qui puisse faire mieux. Vous serez un fier savetier.