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INTRODUCTION

femmes, on n’a pas idée d’une pareille offense à la beauté et au romanesque. C’est ce crime qui m’a toujours empêché, avant toute réflexion, de justifier la Terreur. J’y vois trop de scènes de la plus abominable régression. Je suis sûr qu’en Afrique les plus sinistres cannibales, quand ils s’attablent pour dévorer les mâles qu’ils ont fait prisonniers, mettent de côté leurs captives pour tâcher de leur plaire au dessert. Saint-Just et ses délires sont odieux. Et pourtant plus d’un artiste a parfois éprouvé quelque attrait pour cet adolescent féroce, gracieux de sa personne, chez qui furent si vives les frénésies et les mélancolies de la jeunesse. Je possède un exemplaire de ses œuvres qui appartenait à Talleyrand, et j’y suis allé bien souvent respirer les premiers souffles arides du romantisme, en même temps que le simoun des révolutions.

On peut remémorer de son œuvre insensée de nombreuses apophtegmes, laconiques et denses, d’une emphase noire et toute ensanglantée, qui produisent un grand effet théâtral. J’aime quand il parle des factions qui « nées avec la Révolution, l’ont suivie dans son cours, comme les reptiles suivent le cours des torrents. » J’aime son mot à Robespierre : « Calme-toi, Maximilien, l’Empire est au flegmatique », et ses ultima verba du 9 thermidor : « Les