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Page:Leo - Aline-Ali.djvu/122

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plissait le dessous des arbres, les oreilles pleines des bourdonnements de ce grand silence de la nature, si résonnant de vie et de choses — ivre enfin à demi déjà, quand une douce voix me fit tressaillir.

« — Voulez vous des myrtiles, monsieur ? »

« Je me relevai sur un coude, et il me vint une bouffée de rimes virgiliennes en apercevant près de moi une jeune fille aux cheveux blonds, aux yeux bleus et aux joues vives, dont la jupe courte laissait non pas deviner, mais voir, surtout dans la situation où j’étais, une jambe fort bien faite. Elle me présentait d’un air timide une corbeille pleine de ces petits fruits noirs qu’on recueille ici dans les bois.

« — Est-ce cher ? demandai-je en souriant.

— Oh ! ce que vous voudrez. »

« Je pris une poignée de fruits et lui remis une pièce blanche. Elle n’avait pas de monnaie.

« — Pourtant, il me faut du retour, » lui dis-je en riant.

« Elle se laissa embrasser, non sans rougir. Je la fis causer. Elle habitait avec ses parents un petit chalet, là-bas, et venait tous les jours aux Mélèzes cueillir des myrtiles et des fraises, qu’elle vendait aux étrangers. Elle était si jolie, si naïve, si douce, qu’elle me ravit. En la quittant, j’osai l’embrasser encore, et tout en balbutiant : « Oh ! monsieur ! » elle ne me repoussa que bien doucement.

« Mon Dieu, je ne pensais pas mal ; mais ces doux baisers m’affolèrent si bien que, le lendemain, j’étais aux Mélèzes à la même heure, non plus rêveur et couché sur l’herbe, mais debout, cherchant, un peu malgré moi, mon apparition de la veille. Elle se montra. La scène fut la même, ou à peu près ;