Page:Leo - L Institutrice.djvu/88

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rent à flots. On alla jusqu’à promettre, grande concession ! le repavage de la citerne, sans compter l’embellissement de l’église, la création d’une route, la restauration d’un pont, et le curage d’un ruisseau. Toutes les faveurs enfin du budget devaient se répandre sur Boisvalliers, si le duc était nommé, sans compter la prospérité de la France et une floraison nouvelle de l’ordre qui devaient s’en suivre. L’autorité fit agir le ban et l’arrière-ban de ses féaux et vassaux. L’instituteur partit en tournée, bourré de bulletins officiels ; la femme et les petits du garde-champêtre servirent d’estafettes et d’éclaireurs au pouvoir, tandis que le père présidait les cabarets, que les pouliches se roulaient dans les prés en fleur, que les vaches tondaient les blés, et que les gamins s’initiaient dans les cerisiers aux douceurs de la politique. Et l’institutrice ? En sa qualité d’agent salarié du gouvernement, ne devait-elle pas aussi prêter son concours à la bonne cause ? Certains électeurs n’avaient que des filles. Le mercredi qui précéda le vote, après la sortie de la classe, le maire, accompagné du curé, entra chez Mlle Jacquillat.

Sans raisons bien précises, Sidonie n’était pas au mieux avec le curé. Il y avait de la froideur. Peut-être l’institutrice n’était-elle pas assez pratiquante, n’allant à confesse et à la communion que deux fois l’an, à Noël et à Pâques. C’était peu en effet pour une personne qui a charge de donner le bon exemple. Joint à ceci, que Sidonie ne brodait ni nappes, ni chasubles ; qu’elle continuait de laisser à sa mère le soin de parer l’autel ; qu’elle n’avait fait, en six ou sept ans, que deux vases de fleurs artificielles