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Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/144

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— C’est un paletot, maman, dit Gustave ; on ne porte plus que ça.

— Quelle invention ! ça te donne un air tout drôle.

— Est-ce qu’on t’a collé ton pantalon sur les jambes ? demanda le père.

— Mais, dit Gustave embarrassé, il faut se mettre comme tout le monde.

— Ça doit fièrement te gêner ?

— Pas du tout, c’est très-commode.

— Si c’est commode, ça n’est guère convenable, reprit Mme Bertin ; tu ne penses pas te présenter avec ton sac chez Mme Bourdon.

— Mais si, dit Gustave, mais si, je vous assure. C’est reçu parfaitement.

— Allons, allons, nous causerons de ça plus tard, dit M. Bertin.

Ils entrèrent. Les haillons de la tenture, les trous de la boiserie et du plancher sautèrent aux yeux de Gustave, qui, de loin, ne voyait tout cela qu’à travers les voiles dorés du souvenir. Il s’assit et causa ; mais il était contraint : on perd si vite l’accoutumance des gènes et des laideurs de la pauvreté ! Déjà, dans cette maison, Gustave n’était plus chez lui.

Ses parents lui trouvaient aussi un air étrange qu’il avait pris à la ville ; son ton n’était plus le même ; il avait des expressions qui leur paraissaient bizarres. Sa canne, un lorgnon qui sortait de sa poche, une épingle d’or qui attachait sa cravate, frappèrent les yeux de ses sœurs et leur causèrent en dépit d’elles-mêmes un sentiment pénible. Elles n’avaient, elles, d’autres épingles que celles qu’elles achetaient quatre sous le cent à Chavagny.

Lucie chassa toute mauvaise pensée en embrassant son frère un peu plus fort. Comme à l’ordinaire, Clarisse renferma cette impression avec tant d’autres, fardeau de plus en plus lourd qui la penchait vers la terre. Elle haïssait