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Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/152

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— Mais regarde-la donc au milieu de ces jeunes gens. Bon ! la voilà qui lève une poëlette avec Sylvestre, puis elle court après les écrevisses et s’amuse à les lui enlever avant qu’il ait pu les prendre. Tout cela n’est certainement chez elle que manque d’usage et de tact, mais ce pourrait être ailleurs fort mal interprété.

— Elle est fort piquante ainsi, dit Gavel.

— Vous trouvez ? répliqua sèchement Aurélie.

— Elle y met de la coquetterie, sans doute, reprit Mme Bourdon, mais c’est une coquetterie de village, peu raffinée, et qui ne tire point ici à conséquence.

— Pourquoi ne lui en fais-tu pas l’observation, maman ? dit Aurélie.

— Oh ! je ne me mêle pas de cela, répondit sèchement la grasse petite femme, car je me suis déjà trop aperçue que Lucie n’aime pas les observations.

— Elle aurait pourtant d’assez bonnes raisons d’écouter les tiennes, répliqua Aurélie, qui regardait sa mère comme la bienfaitrice de Lucie, parce que la robe rose était un cadeau de Mme Bourdon.

— Non, non, répéta celle-ci, Lucie a l’esprit d’indépendance. Il n’y a rien à faire à cela. Seulement, ajouta-t-elle de l’air concentré dont elle lâchait ses confidences, Dieu veuille que cela n’aille pas trop loin !

— Ah ! madame ! dit l’ingénieur étonné, dont le regard s’alluma en fixant Lucie.

Mme Bourdon ne répondit pas, mais son air était gros de mystères. Elle n’aimait pas sa nièce, n’ayant pu s’emparer de son esprit, comme elle faisait de celui des autres, avec ses manières félines.

Au bout d’une heure, on fut las de la pêche qui allait assez mal. Une promenade en bateau fut proposée par Émile.

— Oh ! oui, ce sera charmant, s’écria Lucie qui aimait