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Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/208

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Cadet et Jean, et nous en allons tout de suite au bois des Berjottes. Quand même il se passerait douze heures sur vot’ colère, elle n’en serait que plus avisée après.

— Michel a ben parlé ! dit la Mourillon. Va Cadet. Ce soir, quand le père aura songé assez, vous causerez ensemble.

Ils partirent, emportant la collation, car ils devaient passer au bois toute la journée. C’était à une lieue de là, dans la brande, tout proche de la métairie du père Voison.

— Décidément, vos migraines sont sérieuses, mon cher Gavel, disait au déjeuner M. Bourdon. Vous êtes tout défait ce matin !

— Et vous ne mangez pas, ajouta Aurélie.

Mme Bourdon ne dit rien, elle observait du coin de l’œil son futur gendre, et soupçonnait autre chose que les ravages d’une migraine dans l’abattement de son visage et dans l’inquiétude de son regard.

Cet abattement, néanmoins, n’empêchait pas le beau Fernand d’échanger à demi-voix avec Aurélie de tendres propos sur les ennuis de la séparation, car il retournait à Poitiers ce jour même. M. Bourdon s’absentait aussi ; il allait à Ruffec pour une affaire, accompagné d’Émile et de Gustave, qui devaient assister, chez un de leurs parents des environs de cette ville, à une grande partie de chasse dans la forêt.

Donc, à midi, M. Gavel, après avoir tendrement imploré, et cérémonieusement obtenu la permission d’embrasser Aurélie, monta dans sa voiture, et prit la route de Poitiers. En approchant de la ferme des Èves, il fit prendre le galop à Gemma et descendit ainsi, en dépit de cahots et de soubresauts gigantesques, jusqu’au bas du mamelon.

À l’entrée de la lande, il mit son cheval au pas ; il sentait un besoin extrême de repos et de solitude ; son front brûlait ; les efforts qu’il avait faits pour paraître calme,