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Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/391

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— Parce que les gens sont méchants, parce qu’il n’y a pas de bonté sur la terre, et non plus de bonheur ! Je pars, mam’zelle Lucie, parce qu’il le faut ; ne me demandez pas pourquoi.

— C’est impossible ! Je veux le savoir. Il faut me dire vos motifs, Michel ; j’ai droit de les connaître. Ne savez-vous pas que votre départ me rendra malheureuse aussi ?

Il fit une exclamation et un mouvement vers Lucie ; mais, embrassant un des troncs des lilas, comme pour se fixer à cette place, il dit, le front baissé :

— Non ! je vous ai fait un serment l’autre jour, à moi je me suis fait une promesse… et ce qui est résolu se fera. Vous êtes bonne comme la bonté, mam’zelle Lucie, et je ne peux pas dire combien je vous ai de reconnaissance pour votre amitié ; mais il faut que je m’en aille et que je vous dise adieu. Je vas à Poitiers. Quand j’aurai une place, ma mère vous dira où je serai. Mam’zelle Lucie, puisque je suis votre ami, jurez-moi que vous m’écririez si vous aviez besoin de quelqu’un qui vous donnerait son aide, sa vie, tout !…

— Michel ! dit-elle en pleurant, je ne veux pas que vous partiez.

Il pâlit et rougit tour à tour. — Ah ! s’écria-t-il, croyez-vous que j’ai trop de force pour me séparer de vous ? Ne m’ôtez pas la raison et l’honnêteté, Lucie ! C’est parce que… parce que je suis votre ami et un honnête homme que je m’en vais d’ici. Il le faut !… il le faut !

— Dites-moi seulement pourquoi ? reprit-elle en baissant les yeux, tandis que sur ses joues et son front s’étendait une rougeur vive, dites-le-moi, et je vous montrerai que vous avez tort.

Il se taisait, pâle, écrasé d’angoisse.

— Vous n’avez donc pas confiance en moi ? dit la charmante hypocrite en prenant la main de Michel.