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Introduction.

Yang-hi monta au ciel (mourut) en 386.

Or un certain 許映 Hu-ying, descendant d’une ancienne famille de fonctionnaires, reçut l’initiation taoïste de 鮑靚 Pao-tsing, haut mandarin, Taoïste zélé, beau-père du célèbre 葛洪 Ko-houng. Ce Pao-tsing avait aussi des livres anciens, venus on ne sait d’où. De plus, en 292, il avait découvert, dans une caverne, un résumé doctrinal cristallisé là à son intention, qu’il transcrivit et publia. Devenu très fervent sous un aussi bon maître, Hu-ying se retira, en 313, dans une solitude au sud du Fleuve Bleu, prit le nom de 遠遊 le Pélerin, et ne revint jamais. Son frère cadet 許謐 Hu-mi, vécut aussi en solitaire, et mourut en 373. Il légua à son fils 許玉斧 Hu-ufou, 31 traités sur 上清三天正法 la droite loi des trois divinités (ou de la triple divinité) du suprême ciel. Hu-ufou communiqua ces 31 traités à son contemporain Yang-hi (ci-dessus), qui put les comparer avec les 31 sections de son texte. À sa mort, il les légua à son fils 許黄民 Hu-hoangminn, lequel les transmit à son fils 許豫之 Hu-utcheu. En 435, quand il se sentit près de mourir, Hu-utcheu ferma et scella ses livres (appelés à cette occasion 上清寶經三洞妙法 précieux textes du ciel suprême contenant la loi merveilleuse du triple mystère), et les confia à un certain 馬朗 Ma-lang, en lui disant qu’il reviendrait les prendre quand il serait réincarné. En 465, l’empereur 明帝 Ming-ti des premiers Song, ayant entendu parler de ces livres, se les fit apporter et rompit les sceaux. Une vive lumière jaillit aussitôt, et l’empereur tomba malade. Repentant, il s’excusa, et restitua les livres. Comme Hu-utcheu ne revenait pas pour les reprendre, la famille Ma finit par les déposer dans la bibliothèque du 崇虛館 Tch’oung-hu-koan, où ils furent étudiés par le célèbre 陸修静 Lou-siou-tsing, qui les transmit à son discipline 孫遊嶽 Sounn-youyao. À sa mort, en 489, celui-ci les passa au fameux 陶弘景 T’ao-houngking, lequel, dit la tradition, parvint à se procurer aussi les livres de Yang-hi. Usés par l’âge, dit le texte, les deux exemplaires périrent entre ses mains, tandis qu’il les étudiait ; mais il en tira et développa le système. Quand il mourut, âgé de 81 ans, en 536, T’ao-houngking légua son œuvre à son discipline 王遠 Wang-yuantcheu. Or, fait qui est à noter avec soin, ce Wang-yuantcheu avait eu un autre maître, d’une autre religion, 宗道先生 un maître de la doctrine des Ancêtres soi-disant, probablement un Yogi ou un Sivaïte, qui lui enseigna la science des 勝訣 formules victorieuses, mantras et mudras, et l’art des 符籙 charmes et des talismans. Ainsi Wang-yuantcheu introduisit le Tantrisme dans le Taoïsme[1]. Maintenant l’amalgame est complet : un théisme issu de la religion antique, frotté de christianisme et d’amidisme, placé dans un cadre naturaliste très large, avec un culte fait d’offrandes, d’encens, d’invocations, de conjurations, d’exorcismes, de formules, d’amulettes et de

  1. Les procédés diaboliques 鬼法, disent les Bouddhistes, avec indignation et mépris. Au fond, c’est là une calomnie. Pour les Taoïstes, les formules écrites ou figurées, certains gestes convenus, sont la quintessence de la doctrine et des rits de leur secte, laquelle contient sous forme tassée toute l’efficace de la doctrine et des rits, comme l’essence distillée de menthe contient toutes les vertus de la menthe.