Page:Leon Wieger Taoisme.djvu/512

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était brave mais débile. Hei-loan était un colosse, qui n’avait pas plus peur de Lai-tan que d’un poussin. — Chenn-t’ouo, un ami de Lai-tan, lui dit : Vous en voulez à Hei-loan ; mais il vous est si supérieur ; qu’y faire ? — Conseillez-moi, dit Lai-tan, éclatant en sanglots. — J’ai ouï dire, fit Chenn-t’ouo, que dans la principauté de Wei, dans la famille K’oung-tcheou, se conservent trois épées merveilleuses ayant appartenu au dernier empereur des Yinn, avec lesquelles un enfant pourrait arrêter une armée. Empruntez-les. — Lai-tan étant allé à Wei, se rendit chez K’oung-tcheou, s’offrit à lui comme esclave avec sa femme et ses enfants, puis lui dit ce qu’il attendait en échange. — Je vous prêterai une épée, dit K’oung-tcheou ; laquelle des trois désirez-vous ? La première lance des éclairs. La seconde est invisible. La troisième pourfend tout. Voilà treize générations que ces trois épées dorment dans ma famille. Laquelle désirez-vous ? — La troisième, dit Lai-tan. — Alors K’oung-tcheou accepta Lai-tan comme client de son clan. Au bout de sept jours, ayant donné un festin en son honneur, il lui remit l’épée désirée, que Lai-tan reçut prosterné. Muni de cette arme, Lai-tan chercha Hei-loan. L’ayant trouvé qui dormait ivre-mort, il le pourfendit trois fois, depuis l’épaule jusqu’à la ceinture, sans qu’il se réveillât. Étant sorti, il rencontra le fils de Hei-loan, et le pourfendit également trois fois. Tous ses coups traversaient les corps, sans éprouver plus de résistance que dans l’air ; mais la section se ressoudait après le passage de la lame. Voyant que son épée merveilleuse ne tuait pas, Lai-tan s’enfuit navré. — Cependant Hei-loan s’étant réveillé, gronda sa femme de ce qu’elle ne l’avait pas mieux couvert durant son sommeil. J’ai pris froid, dit-il ; j’ai le cou et les reins comme engourdis. — Sur ces entrefaites, son fils étant entré, dit : Lai-tan aura aussi passé par ici. Il m’a donné dehors trois coups, qui ont produit sur moi précisément le même effet[1].

Q. Lors de sa randonnée dans l’Ouest, les Joung, tribu de ces régions, offrirent à l’empereur Mou des Tcheou, une épée extraordinaire et du tissu d’asbeste. L’épée longue de dix-huit pouces, traversait le jade comme de la boue. Le tissu sali mis au feu, en sortait blanc comme neige. On a essayé de révoquer ces faits en doute, mais ils sont certains.


  1. La propriété merveilleuse de cette épée, consistait en ce qu’elle traversait, sans diviser ni la cohésion ni la continuité.