Page:Leopardi - Poésies et Œuvres morales, t2, 1880, trad. Aulard.djvu/208

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de Delphes, ils prièrent instamment Apollon de les payer ; le dieu répondit qu’il les satisferait au bout de sept jours : ils n’avaient, en attendant, qu’à faire chère lie à leurs frais. La septième nuit il leur envoya un doux sommeil, dont ils ne se sont pas encore éveillés, et ils ne demandèrent pas d’autre paie. Mais puisque nous sommes sur les fables, en voici une autre, au sujet de laquelle je vais te poser une question. Je sais qu’aujourd’hui vos pareils tiennent pour certain que la vie humaine, dans n’importe quel pays habité et sous n’importe quel ciel, dure naturellement, sauf de petites différences, la même quantité de temps en moyenne. Mais un de ces bons anciens raconte que les hommes, dans certaines parties de l’Inde et de l’Éthiopie, ne subsistent pas au delà de quarante ans : celui qui meurt à cet âge, meurt très vieux, et les enfants de sept ans sont en âge de se marier. Nous savons que cette dernière affirmation se trouve être à peu près vraie dans la Guinée, dans le Decan et dans les autres lieux placés sous la zone torride. Donc, en supposant qu’il se trouve une ou plusieurs nations où les hommes en général ne dépassent pas quarante ans, et que cela ait lieu naturellement, et non, comme on l’a cru des Hottentots, par d’autres causes, je te demande si pour cela il te semble que les peuples en question doivent être plus malheureux ou plus heureux que les autres.