Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/34

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aimé, mais estimé son père, l’avoir placé très haut sur un piédestal, et s’être ressenti très fier d’être issu de lui, de porter, de glorifier son nom, et, à défaut d’autre héritage, recueillir la succession de renom et d’honorabilité, par lui laissée, puis voir tout à coup la statue idéale abattue sur le socle saccagé, le nom flétri, la renommée barbouillée d’infamie, n’est-ce pas là un supplice digne des tribus du Far-West, où, sous les yeux, de la mère, on martyrise le corps exsangue de l’enfant, attaché au poteau de douleurs ? Zola endura cette torture avec sa robuste et patiente énergie. Il lutta contre les violateurs de sépulture, il défendit, comme l’héroïne biblique, le cadavre de l’être chéri contre les attaques furieuses des journalistes de proie. Il écarta les becs de plumes qui déchiraient cette chair morte. On a peine à comprendre, à distance, la flamme des polémiques s’étant éteinte, l’acharnement que mirent certains vautours de la presse à se ruer sur ce mort et, à le dépecer en poussant des cris sauvages. Voici les faits qui fournirent la pâture à ces rapaces nécrophages. Je les résume, d’après les documents du temps, et les pièces originales qui furent alors reproduites : Au mois d’avril 1898, un journal de Bruxelles, le Patriote, publiait, dans une correspondance de Paris, les lignes comminatoires suivantes : … On se demande ce qu’attend le général de Boisdeffre peur écraser d’un seul coup ses adversaires, qui sont en même temps les ennemis de l’armée et de la France. Il lui suffirait, pour cela, de sortir, dès aujourd’hui, une des nombreuses preuves que l’Etat-major possède de la culpabilité de Dreyfus, ou même de publier quelques-uns des nombreux dossiers qui existent, soit au service des renseignements, soit aux archives de la guerre, sur plusieurs des plus notoires apologistes du traître, ou sur leur parenté