Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/358

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Paris et châtier les parisiens : tout son plan, tout son rêve.

S’il avait pu constituer cette armée nombreuse, accrue par des renforts successifs « l’une des plus belles armées que la France ait possédées », comme il l’a déclaré cyniquement à la tribune, oubliant Sedan et le traité désastreux qui allait être signé à Francfort, et dont on arrêtait les clauses pendant qu’il parlait, cette belle armée il la devait à l’Allemagne. Sans les complaisances, sans la complicité des prussiens, M. Thiers n’eût pas pris Paris, n’eût même pas essayé de le prendre. Réduit aux forces insuffisantes qu’il possédait au lendemain du Dix-Huit mars, il eût accepté avec joie une transaction quelconque, qui le laissait à la tête de la République, avec la gloire légitime d’avoir arrêté l’effusion du sang et pacifié le pays.

C’est donc l’Allemagne qui a fourni à M. Thiers la force suffisante pour écraser la Commune. Elle l’a fait bénévolement. Elle n’y était pas obligée par traité. Bien au contraire, elle avait limité l’effectif qu’elle autorisait à 30,000 hommes. Elle permit de l’augmenter de 100,000 hommes. Ceux qui, en dehors de toute question d’humanité, déplorent la défaite de l’insurrection de 1871, qu’ils considèrent comme celle du prolétariat, mais ne craignent pas, en invoquant de dangereux et naïfs sentiments de fraternité et d’internationalisme, de souhaiter l’oubli de la guerre de 71, et qui rêvent d’un rapprochement avec les allemands, devraient se souvenir que Thiers et Mac-Mahon n’ont pas seuls noyé dans le sang la République communaliste et la révolution sociale. Ils n’eussent pas réussi s’ils n’avaient eu derrière eux, leur donnant la force qui leur manquait, le Kaiser et Bismarck. La Commune a été vaincue par des troupes françaises, sans doute, mais sous le protectorat de l’Allemagne. Il s’est trouvé, non seulement des libellistes sans scrupules comme sans talent, pour prétendre que l’Allemagne avait