Page:Lepelletier - Paul Verlaine, 1907.djvu/55

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
45
ENFANCE

forme à la vérité que la souche noble. Tous les parents des Verlaine, à Bouillon, à Jehonville, à Paliseul, étaient des cultivateurs, des petits propriétaires. Assurément, d’anciennes familles nobles, en perdant domaines, privilèges, rang, ont pu redevenir roturières, abandonnant ou cachant les titres inutiles, parfois gênants ou même nuisibles. Mais il demeure toujours, dans la mémoire des descendants, des souvenirs vaniteusement transmis par les aïeux, de la grandeur déchue. En mettant tout orgueil à part, les gens les plus modestes rappellent volontiers le rang lointain de leur maison. On cite facilement, dans la familiarité des propos de table ou de salon, les ancêtres qu’on a pu avoir ayant eu titres et particules. On se met au-dessus et en dehors de toute prétention aristocratique, mais on a soin de faire connaître qu’on est d’une lignée nobiliaire. Jamais ni Paul, ni sa mère n’ont fait une allusion à une noblesse ancienne, à des parchemins perdus ou dédaignés, mais ayant existé. Ajoutons que le fait de porter un nom de village n’indique pas la noblesse. Les nobles de l’ancien régime avaient tous un nom patronymique auquel ils ajoutaient celui de la terre, du fief, du château, du village qu’ils avaient en apanage, ou qu’ils détenaient à un titre quelconque. Dans la liste des membres de la famille Verlaine figurant sur les lettres de faire-part, soit au décès de M. Verlaine père, soit à la mort de la mère du poète, ne figure aucun nom nobiliaire. Ceci d’ailleurs a fort peu d’importance. Comme Alfred de Vigny, Verlaine pouvait dire de ses aïeux, nobles ou paysans : « Si j’écris leur histoire, ils descendront de moi. » Mais il n’a rien écrit sur ses origines, ni sur les faits et gestes ancestraux, qu’il ignorait, comme la plupart des fils de paysans, d’artisans et de petits bourgeois. Ce silence prouve son défaut de renseigne-