Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/140

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d’Aulnay, autant par avertissement que par prière, avait posée sur son bras. Croyez-vous donc qu’après avoir été déclarés mariés par un ministre, qu’après avoir passé dans le doigt de mon épouse l’anneau nuptial qui y brille, je ne puisse lui parler, je ne puisse pas même embrasser le pan de sa robe sans en avoir auparavant obtenu la permission ?

Terrifiée par cette explosion, Antoinette était devenue presqu’immobile, rougissant et pâlissant tour à tour ; son cœur battait avec violence. Mais madame d’Aulnay, qui avait complètement gardé son sang-froid, répondit tranquillement :

— Soyez calme, major Sternfield, et ne me forcez pas de regretter déjà la part que j’ai prise à la consommation de votre union. Oui, il faut qu’il en soit comme vous l’avez dit, et jusqu’à ce que votre mariage ait été proclamé publiquement, je ne veux pas que le nom sans tache de ma cousine devienne le jouet des domestiques et des propagateurs de scandales, à cause de politesses trop empressées de votre part. Plutôt que pareille chose arrive, je n’hésiterai pas à vous interdire l’entrée de cette maison.

— Par le ciel ! vous me mettez hors de moi ! répliqua-t-il avec fureur. Je ne me soumettrai jamais, je ne dois pas me soumettre à une tyrannie aussi insupportable. Antoinette ! les promesses sacrées que tu m’as faites l’autre soir devant Dieu étaient donc une comédie, une sanglante moquerie ?