Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/225

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mariage sans m’assurer auparavant que ma femme possédait des charmes pécuniaires, en outre de ceux qu’elle a déjà ?

— Merci, je vous suis très-reconnaissante de cette franchise. Maintenant je ne dois plus regretter avec autant d’amertume ni expier par des remords si violents mon amour qui décline, mon indifférence à votre égard qui augmente tous les jours.

— Que ton amour pour moi augmente, ou diminue, cela m’importe fort peu, Antoinette, car tu ne pourras jamais oublier que tu es ma femme.

— Il n’y a pas de danger que le forçat oublie la chaîne qu’il est obligé de traîner, dit-elle amèrement.

— C’est une chaîne que tu as acceptée de ta pleine liberté… Mais trêve de sentiment. Avant de terminer cette entrevue qui, je le crains bien, a été déjà trop prolongée pour notre repos mutuel, je n’ai qu’à ajouter qu’il y a des choses que je supporterai et d’autres que je ne souffrirai point. Ton indifférence, je la supporterai avec philosophie ; mais prends bien garde d’exciter ma jalousie en t’amusant avec d’autres. Adieu !… Comment ! tu ne me permettras pas de t’embrasser ? Bien, qu’il en soit ainsi : ton humeur sera peut-être meilleure à notre prochaine rencontre.

Jeanne, qui se trouvait par hasard dans le corridor et qui reconduisit le major à la porte, ne remarqua rien de particulier sur ses traits souriants ; mais elle fut étonnée quand, allant remettre à Antoinette un