Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/265

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— Ah ! non, je ne te déteste pas, je ne te fais pas de reproches ; mais ce fut une époque bien fatale que celle où j’entrai dans cette maison agréable et hospitalière.

— Dis-moi ce que t’a dit ou fait Audley pour te mettre dans une situation d’esprit aussi désespérée ?

— Il serait douloureux et inutile pour moi de te donner d’autres détails que ceux que tu connais déjà ; mais j’ai été bien douloureusement éprouvée.

— Oh ! quant à cela, ma chère enfant, c’est le lot de toutes les femmes mariées. Voici par exemple André qui se met quelques fois dans des fureurs extrêmes à propos de rien, pour un dîner qu’on a retardé, et d’autres fois pour des pointes, des sarcasmes qu’il reçoit. Antoinette sourit, mais d’un sourire étrange et plein d’amertume.

— Si, répondit-elle, Audley Sternfield ne me donnait pas de plus grandes causes de chagrins que M. d’Aulnay ne t’en a données, je ne regretterais pas autant que notre union soit irrévocable.

— Mais, pour en revenir à la résolution que tu as prise, que gagnerais-tu, chère, en retournant à la monotonie de la vie de campagne plus tôt que tu aurais pu t’en exempter ? Ici, au moins, tu as quelques distractions, quelques amusements.

— Comprends-tu parmi ces derniers les persécutions que Sternfield m’inflige journellement ?

— Mais il te persécutera à Valmont aussi bien qu’ici. Tu te rappelles ce qu’il a voulu faire pendant que tu y étais ?