Page:Leprohon - Antoinette de Mirecourt ou Mariage secret et chagrins cachés, 1881.djvu/99

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Dès que Sternfield se fût retiré, Antoinette se sauva dans sa chambre, les joues couvertes d’un vif incarnat, les sourcils froncés et se mit à marcher avec agitation de long en large. Madame d’Aulnay, qui la suivit de près, la trouva dans cet état.

— Qu’y a-t-il donc ? s’écria-t-elle. Serais-tu encore malade ?

— Malade et malheureuse ! répondît la jeune fille d’un ton oppressé. Dois-je ou ne dois-je pas me confier à toi Lucille ?

Et ses yeux se promenaient doucement sur la figure de sa cousine, comme pour y surprendre quelque signe de sympathie.

Mais, hélas ! les traits de Madame d’Aulnay ne laissaient aucunement deviner qu’elle fût déjà au fait de ce que sa cousine voulait lui confier. Oh ! si le bon ange eut pu alors parler à Antoinette, comme il l’aurait mise en garde contre un mentor aussi dangereux ! comme il l’aurait avertie de placer ailleurs sa confiance ! Mais la voix de Lucille était si tendre, elle lui fit tant de douces caresses, lui déclara son affection et le désir qu’elle avait de travailler à son bonheur avec des paroles si éloquentes, que la pauvre enfant s’y laissa prendre. Peu à peu elle apprit que Sternfield, avec un instinct merveilleux, ainsi que le disait Antoinette dans sa naïve simplicité, avait deviné le contenu de la lettre de son père, et qu’il avait employé