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à la ville ; oui, il endurerait plus aisément l’air glacial de l’hiver que l’atmosphère de duretés qui avait si subitement envahi le toit paternel, autrefois si heureux. Lorsqu’il manifesta son intention de partir si vite et par un pareil temps, la tante Ratelle s’y opposa avec chaleur ; mais Durand, guidé peut-être par l’orgueil, y mit peu d’opposition. Cependant, lorsqu’il lui souhaita le bonjour, il s’opéra dans sa voix et ses manières un adoucissement subit qui tenta presque Armand à mettre le malaise de côté et à demander ce qui pouvait avoir refroidi l’amour profond qui existait entr’eux et qui avait rendu leurs relations heureuses ; mais il en fut empêché par la crainte d’une rebuffade et de s’entendre dire ce qu’il redoutait, que c’était la dépense qu’il occasionnait à son père qui était cause de la froideur et de l’irritabilité paternelles.

De retour à la ville, notre héros se livra à la routine journalière de sa vie avec autant de diligence qu’avant, mais avec une disposition d’esprit moins joyeuse. Les lettres de chez son père devinrent de plus en plus rares et aussi peu satisfaisantes que jamais ; de son côté, il écrivit bien rarement, et lorsqu’il le faisait, il adressait ordinairement ses lettres à Paul.

Par une superbe après-dinée qu’il paraissait plus triste que d’ordinaire, madame Martel, à qui il faisait pitié, vu que depuis quelque temps il était souvent retenu à la maison et au bureau, insista auprès de lui pour qu’il allât se promener.