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ils prirent leur congé, et en revenant notre Adonis militaire s’abandonna à d’amers regrets sur ce que « cette charmante petite créature avait pour destinée de passer toute sa vie au milieu des vaches, des volailles et autres choses semblables. »

Aussitôt qu’ils furent partis, Durand annonça à sa femme qu’il pensait aller à Montréal pour y acheter des épiceries et autres articles de nécessité, ainsi que pour voir le marchand à qui il avait coutume de vendre la plus grande partie des produits de sa ferme, et il lui demanda si elle aimerait à l’accompagner.

— Quoique nous n’ayons cette année ni beurre, ni volailles à vendre, je puis, ma petite femme, te donner quelques piastres, que tu pourras dépenser en rubans, dans les beaux magasins, — ajouta-t-il en souriant, car il s’attendait à ce que Geneviève accepterait son offre avec empressement : attendu qu’un voyage à la ville, même sans la perspective d’avoir à y dépenser quelques dollars, était alors considéré par les femmes d’Alonville comme un insigne privilégié.

Elle réfléchit un moment, hésita, puis, à la surprise et au désappointement de son mari, elle refusa, alléguant pour raison qu’elle ne savait pas comment elle agirait avec les Lubois. Elle pensait que si elle allait à la ville sans leur faire une visite, pour remercier madame Lubois du grossier bijou à l’ancienne mode qu’elle lui avait envoyé comme cadeau de noces, la famille la