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LE MANOIR DE VILLERAI

rompre : enfin, n’y tenant plus : Excusez, mes amis, sans vous interrompre, il y a longtemps que j’entends dire qu’il y a quelque chose de même dans la montagne ; est-ce bien loin d’ici, cette maison ?

— Non, c’est la troisième.

— Est-ce qu’on ne pourrait pas y aller ?

— Ah ! oui, je voudrais bien… fiez-vous-y ; il y en a bien d’autres que vous qui ont déjà essayé, mais si vous saviez…

— Cette bête dont vous parlez, est… noire ? est-elle grande, cette bête-là ?

— Comme un homme à quatre pattes, à peu près.

— Je gage que c’est un loup-garou !

— Un loup-garou !

— Oui, un loup-garou, c’est fait de même ; c’est noir, et c’est comme un homme à quatre pattes. J’en ai vu deux, et j’en ai délivré un par chez nous.

— Ah ! mon Dieu, puisque vous connaissez ça, vous pouvez nous rendre un grand service !

— J’en ai délivré un, et un dur, allez, qui l’était depuis dix ans.

Les trois hommes se dirent encore quelques mots, et tout fut convenu.

— À minuit, donc ! dit le voyageur ; c’est toujours à minuit qu’il faut les délivrer. Allons nous coucher, et à minuit nous partirons.

Notre voyageur s’endormit d’un profond sommeil, les deux autres ne purent fermer l’œil. À onze heures et demie ils étaient debout.

— Un couteau ! il me faut un couteau ! Vous allez me suivre tous les deux à distance, et ne faites pas de bruit… au moindre bruit… vous entendez ? il ne faut pas souffler.

Tous trois partirent à pas de loup, le voyageur en apparence sans émotion, et les deux autres tremblant de tous leurs membres. Un clair de lune magnifique, comme il est toujours dans la montagne, allait éclairer une scène terrible.

Quand ils furent à cinquante pas de la maison :

— Je n’avance plus, dit Baptiste.

— Moi non plus, dit Pierre.

— Avancez, avancez !