Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/186

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à la tombe par des chemins différents ; mais son souvenir est inviolablement placé dans mon âme ; je le lui répète toujours et elle me croit, quoiqu’elle dise le contraire.

Enfin nous nous sommes séparés ; je l’ai suivie longtemps du regard jusqu’à ce que son chapeau ait disparu au milieu des arbres et des rochers. Mon cœur malade s’est serré comme après notre première séparation. Je me suis réjoui de ce sentiment ! Est-ce que ce serait la jeunesse avec ses orages bienfaisants qui voudrait encore me revenir ? ou bien serait-ce sa dernière faveur ? son regard d’adieu ? son dernier don pour le souvenir ? Il serait vraiment plaisant de m’imaginer que j’ai encore l’air d’un adolescent ! Et cependant mon visage, quoique pâle, est encore frais, mes membres sont souples et vigoureux ; mes cheveux forment d’épaisses boucles, mes yeux jettent des flammes, mon sang bouillonne !

Je suis revenu chez moi, je suis monté à cheval et suis allé galoper dans la steppe. J’aime courir sur un cheval fougueux à travers les grandes herbes et contre le vent. J’aspire avec avidité les émanations suaves ; je plonge mon regard dans