Page:Lermontov - Un héros de notre temps, Stock, 1904.djvu/307

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et ne confiait à personne ses secrets de famille ainsi que ceux de son âme. Il ne buvait presque pas de vin. Quant aux jeunes filles cosaques dont le charme est difficile à comprendre pour celui qui ne les a jamais vues, il ne leur faisait jamais la cour. On disait cependant, que la femme du colonel n’était pas indifférente à son regard plein d’expression ; mais il se fâchait réellement, lorsqu’on faisait quelque allusion à cela.

Il n’y avait qu’une passion dont il ne se cachait point : c’était la passion du jeu. Devant un tapis vert, il oubliait tout et perdait habituellement ; mais sa mauvaise chance continuelle excitait son entêtement. On racontait que pendant une nuit d’expédition où il jouait sur son oreiller et était assez favorisé par la chance, tout à coup des coups de feu retentirent ; on battit l’alarme et tous s’élancèrent et coururent aux armes : « Faites la banque ! » cria Voulitch sans se lever, à un des pontes les plus ardents. « Va pour le sept ; répondit celui-ci en s’enfuyant. Malgré l’alerte générale, Voulitch tailla le coup et donna la carte.

Lorsqu’il parut sur la ligne, une fusillade nourrie était engagée. Voulitch ne s’occupait ni