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BALAOO

Encore, Mme Jules et Mme Roubion restèrent-elles à l’entrée de la voûte.

L’absence du Maire et de Roubion dura au moins cinq minutes. Quand ils rentrèrent, les autres virent tout de suite, à leurs figures consternées, qu’il ne se passait rien de bon. Le docteur Honorat, le pharmacien et le notaire ne quittaient point des yeux M. le Maire, attendant qu’il parlât. Et le condamné à mort, qui, au petit jour, dans sa cellule, regarde le magistrat chargé de lui annoncer le rejet de son pourvoi, n’a point plus d’épouvante au cœur.

— Mais enfin, dites-nous ce qu’il y a ? grelotta Mme Sagnier.

— Eh bien ! voilà, répondit le Maire en s’épongeant le front avec son mouchoir. J’ai vu Hubert par le judas. Il demande qu’on lui livre le docteur Honorat.

Le docteur, sur sa chaise, reçut comme une secousse.

M. Jules ajouta :

— J’ai fait mon devoir, j’ai refusé.

Là-dessus, il y eut un silence de mort. Ces dames, à part elles, pensaient que le Maire en prenait bien à son aise. Après tout, le docteur Honorat était célibataire.

Mme Godefroy surmonta, la première, la tyrannie de ses nerfs :

— Qu’est-ce qu’il a répondu ?

— Il a dit, fit le Maire, qu’il allait consulter ses frères, et il est parti !

— Lui avez-vous dit, au moins, qu’ils couraient les plus grands dangers en restant ici ? que les gendarmes allaient venir, et qu’ils feraient mieux de s’enfuir dans un autre pays ? interrogea M. Sagnier.

— Je lui ai dit tout ça ! déclara froidement le Maire, mais il m’a répondu que ça ne me regardait pas !