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BALAOO

Ainsi pensait Balaoo à travers la forêt profonde, en marchant sans route et sans boussole et sans allumettes, en pleine nuit sans lune, vers sa hutte du Grand Hêtre qui était pour lui comme qui dirait sa garçonnière. Ainsi pensait Balaoo, le cœur troublé de ses méfaits, et portant sous le bras, dans un paquet proprement roulé, la robe de l’Impératrice.

Une voix, au-dessus de lui, tout là-haut, le sortit de sa réflexion :

— As-tu bien déjeuné, Jacquot ?

— L’idiot ! fit tout haut Balaoo, en haussant les épaules.

Aussitôt la voix reprit dans les arbres noirs :

— Bonjour, madame, comment vous portez-vous ?

— Quand tu auras fini de faire l’imbécile, général Captain ! commanda l’anthropopithèque d’une voix rude et animale et en employant des sons animaux qui produisirent leur effet immédiat.

Général Captain cessa de jouer à l’homme et, du haut d’une branche si élevée que nul être, d’en bas, ne pouvait l’apercevoir, même si on avait été en plein jour clair, même si on avait eu les yeux de Balaoo, il souhaita humblement, comme un humble concierge-perroquet qu’il était et dans la langue animale-perroquet que Balaoo comprenait très bien, car presque toutes les langues animales se comprennent, la bienvenue à son maître.

Balaoo émit quelques grognements et lui demanda comment il se faisait qu’il ne dormait pas encore à cette heure. Général Captain lui répondit qu’il avait été réveillé par une grande lueur qui brillait du côté du village.

— D’en bas, tu ne peux la voir, fit comprendre l’oiseau-concierge à l’anthropopithèque ; mais moi, je la