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BALAOO

ce qu’ils feraient… ce que mon maître Coriolis ferait ! Tandis que tes frères, ils n’ont besoin de rien. Ils sont comme les bêtes qui savent tout et à qui on n’en fait pas accroire, dans la forêt. Tes frères, je les aime bien. Ils auraient été heureux comme tout, s’ils étaient nés dans la forêt de Bandang.

— Tu parles toujours de ta forêt de Bandang, Balaoo ? Tu la regrettes donc bien ?

— Des fois !

— Et moi, osa interroger la voix tremblante de Zoé : m’aimes-tu ?

— Toi, tu ne comptes pas, tu es une femme d’homme !

— Écoute, Balaoo, je connais une femme d’homme qui n’a qu’à se promener dans la forêt en disant : Balaoo ! Balaoo ! et Balaoo accourt d’aussi loin qu’il est et aussi vite qu’il peut.

— Celle-là, souffla Balaoo, nerveux, celle-là, vois-tu, tu ferais mieux de ne pas en parler et ne prononce jamais son nom devant moi, tu le salirais rien qu’à le faire passer par ta sale petite bouche de sale petite sorcière d’hommes ! Parle aux hommes, toi ; les hommes te comprendront et te prendront dans leur basse-cour si ça peut te faire plaisir… mais ne parle pas à Balaoo !

Zoé pleurait dans l’ombre.

— Pourquoi pleures-tu, Zoé ?

— Il n’y a pas de quoi rire, bien sûr, de ce que tu m’as dit ; j’avais cru que tu étais redevenu mon ami, à cause que tu m’as donné la robe. Pourquoi que tu es ici, puisque tu ne te plais que chez elle ?

— Espèce de sale petite sorcière d’hommes, tu oublies que je suis venu dans la forêt pour défendre tes frères contre ceux de ta Race.