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BALAOO

irai. Vous n’avez qu’à lui dire un mot, un seul, et elle me recevra tout de suite ! »

« Le scandale prenait une proportion telle que M. Massepain, pour y mettre court, demanda au visiteur : « Quel mot faut-il donc lui dire ?

— Dites-lui Bilbao !

Bilbao ?

— Oui, Bilbao ! elle comprendra, allez !

Bilbao ! répétait-on, en se moquant, il grandira, car il est espagnol ! »

« À peine l’affreux individu se fut-il aperçu que l’on avait l’air de se moquer de son Bilbao (son pays d’origine, sans doute), qu’il redevint tout à fait furieux. Bousculant et renversant tous ceux qui voulaient s’opposer à sa marche en avant, il pénétra dans la salle des fêtes. La mariée s’était réfugiée dans un cabinet particulier ; mais ce fut précaution perdue, car l’autre devina où elle était et, renversant tables et chaises, brisant vaisselle et service pendant que les invités couraient aux fenêtres du boulevard Saint-Germain pour appeler au secours, arrivait contre la porte qui le séparait de notre Arlette nationale et défonçait l’huis d’un coup de soulier terrible. Arrivé auprès de la mariée qui se pâmait dans les bras de ses demoiselles d’honneur, il parut tout étonné et lui demanda pardon en disant tout haut : « Tiens ! je me suis trompé ! » Et il revint à pas tranquilles et le sourcil froncé dans la salle des fêtes où régnait un désordre, un tumulte bien compréhensibles. Des gardiens de la paix, montés en hâte, voulurent lui mettre la main au collet, mais il fit un bond jusqu’à une fenêtre et sauta dans un arbre. Une foule énorme, attirée par les cris qui venaient du restaurant, stationnait sur le boulevard. Des clameurs accueil-