Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/116

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— J’ai toujours pensé que vous étiez un brave garçon ! J’ai foi en vous. Vous voyez ce bouton électrique, si vous avez besoin de moi cette nuit, appuyez là ! j’ai pris mes précautions, on accourra à votre secours ! À bientôt, Titin ! Je vous laisse ma petite lanterne sourde.

— Ouf ! soupira Titin, quand l’autre eut disparu. J’ai cru qu’il ne me quitterait pas ! Ce qu’il me rase avec son Hardigras !

De fait, Titin pensait à tout autre chose… Quand il se fut hissé sur les toits, ce n’était pas après Hardigras qu’il courait, et quand il se retrouva dans le magasin après l’expédition que nous savons, au balcon de Juliette, ce n’était plus le même Titin… le Titin que nous avons connu triste, las de tout… Il avait retrouvé toute sa joie de vivre, toute son exubérance, cette merveilleuse humeur et ce mépris incroyable de tout ce pourquoi les hommes veillent, courent, travaillent, naviguent et bataillent, c’est-à-dire le souci du lendemain…

Le présent seul existait pour lui dans sa splendeur révélée. Que ferait-il d’une aussi merveilleuse découverte ? Il n’en savait fichtre rien ! Mais « en cette minute, en ce lieu », il pouvait s’écrier : « Elle m’aime ! Elle m’aime !… » Et il ne se gênait pas pour le proclamer devant toutes ces casseroles assemblées dont l’âme de fer-blanc vibrait de son enthousiasme, débordant…

Oui, ils s’aimaient d’amour. Ils avaient découvert cela sur le balcon enchanté, à travers toutes leurs mauvaises paroles qui accouraient sur leurs lèvres, parce qu’ils avaient