Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/137

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(Nous sommes Mores,
Nous le savons,
Nous avons l’air d’Africains,
Mais si nous nous lavions
Peut-être nous vous plairions ! )


Et les trois autres reprirent en chœur la vieille chanson qui va réveiller le bon bourgeois niçois à l’heure où les gais compagnons reviennent, au bras de leurs petites amies, de fêter le mai ou tout autre solennité, lesquelles ne font défaut en aucune saison.

Sien Morou lou saben…

Ce n’est pas tout, déclara-t-il, nous avons assez entamé la recette ! Il faut qu’il nous en reste pour Carnevale.

— Et puis, c’est l’heure des tripes ! fit remarquer le Bedeù.

Et ils s’en furent, après s’être délestés de leur monnaie dans le tiroir de Fred, lequel accompagna Titin presque sur le seuil avec toute la déférence que l’on doit à un honorable commerçant dont la clientèle fait honneur à l’établissement.

On ne devait plus revoir le Bastardon avant l’entrée de Carnevale dans sa bonne ville de Nice. Entrée à jamais mémorable où l’on vit à la fois Carnavale, Titin et enfin Hardigras !

Ce jour-là, une agitation inaccoutumée règne dans les rues qui se peuplent comme par enchantement d’une multitude déjà prête à la joie et accourues des campagnes environnantes. Les étrangers s’arrachent à coups de billets de banque les places restées vacantes aux fenêtres, sur les balcons, dans les loges. Çà et