Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/221

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— Mademoiselle Antoinette !

Ils s’étaient tous levés, avaient couru au-devant d’elle et ils restèrent stupéfaits en apercevant une charmante et belle enfant des champs, mise à l’ancienne mode niçoise, comme il s’en rencontre encore dans les petits pays cachés, dans la montagne.

— Eh bien ! Vous ne me reconnaissez pas ? Vous vous attendiez peut-être à me voir revenir en robe de mariée !…

— Qu’est-ce que tu as fait de ta robe ? lui demanda tout de suite Mme Supia.

— J’en ai fait cadeau à Hardigras.

— Hardigras l’a habillée comme il a pu ; fit Titin, en se montrant. Sa garde-robe n’est pas très fournie, vous savez.

— En paysanne ou en princesse, elle est toujours aussi jolie, exprima Hippothadée en la dévorant des yeux.

— Entre ! ordonna Supia en poussant la jeune fille dans son bureau.

— Vous permettez que je rentre aussi, dit Titin, car j’ai un petit mot à vous dire de la part de Hardigras !…

Maintenant qu’il tenait Antoinette, M. Supia n’éprouvait plus pour Titin ces sentiments d’indulgence et de conciliation qui l’avaient envahi dans le cabinet du commissaire de police. Faut-il dire qu’il regrettait tout à fait sa confession ?

Aussi oubliait-il que Titin se défaisait spontanément d’un tel gage et ne se souvenait-il que du rapt inqualifiable qui avait failli jeter par terre ses plus savantes combinaisons.

— Monsieur Titin, lui répliqua-t-il de sa voix la plus sèche et avec son air le plus désagréa-