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Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/83

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Mais Tony Bouta fit entendre :

— Possible que Titin soit pour ce soir à la Fourca !… c’est demain que l’on tire le « menon ! » (le chevreau). Il doit organiser la distribution des « gijouala » (cocardes) et faire répéter la fanfare !

M. Sébastien Morelli pensait que ces hommes devaient avoir raison. Il trouverait à la Fourca la mère Bibi : elle savait où était Titin-le-Bastardon… Mais il était trop tard pour prendre le train de Grasse et M. Morelli remit au lendemain son expédition. Il ne quitta point la place Arson sans avoir remercié MM. Pistafun, Bouta, Tantifla et Aiguardente et il dut décliner l’invitation de ces braves qui lui offraient une tournée, au cabanon.

Le lendemain, à trois heures, M. Morelli arrivait à la Fourca-Nova.

La Fourca était une vieille petite cité qui dressait sur le rocher la pyramide dorée de ses antiques maisons accrochées l’une à l’autre et surmontées d’une tour moyenâgeuse du haut de laquelle on apercevait tout le pays environnant, depuis les lointains de Grasse jusqu’à la mer d’azur… Cette tour était surmontée au temps jadis d’une potence destinée à rappeler à ceux de la plaine que les seigneurs du Mont et du Château avaient droit sur eux de haute et basse justice. D’où le nom de la « Fourca » (la fourche, la potence) qui avait fini par prévaloir dans tout le pays du Loup.

Le Loup est une rivière qui, à quelques kilomètres de là, sort des gorges les plus abruptes, les plus sauvages qui se puissent imaginer et parcourt jusqu’à la côte une contrée tantôt verte comme la Normandie, tantôt émaillée