Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/85

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les grilles fermées de la Patentaine, la villa des Delamarre, sans pousser un gros soupir. C’était là qu’avait été élevée la petite Toinette, autrement dit Mlle Agagnosc, avec laquelle il avait fait de si bonnes parties en compagnie des chèvres de la mère Bibi…

M. Delamarre avait appelé sa villa « la Patentaine », qui signifie en provençal la Prétentaine, parce que c’était là qu’il avait résolu, sa fortune faite, de vivre et mourir le plus gaîment et le plus grassement du monde. Hélas ! il ne connut point longtemps la « Patentaine » et s’il mourut gaîment, il y mourut trop vite à son gré… et au gré de Toinette, comme nous savons déjà…

M. Morelli, passa, lui, sans soupirer devant la Patentaine et commença de gravir les ruelles qui conduisaient tout là-haut à la place où, de tout temps, on avait « donné le festin ».

Il tourna au coin de la vieille église à base romane, rafraîchie d’un pilier Renaissance et riche encore à l’intérieur comme une basilique, de tous les trésors dont certains datent de l’an mille, époque où tous les mécréants achetaient le paradis avec les biens dont ils croyaient, n’avoir plus besoin sur terre.

Puis, le dédale des ruelles se fit plus abrupt, il passa sous des voûtes qui étaient là moins pour relier des maisons entre elles que pour les soutenir, et il déboucha enfin dans l’apothéose ensoleillée d’un festin qui durait depuis quatre heures et dont Titin le Bastardon semblait être le héros. Entre M. le maire, un vrai « petou » (bon vieux paysan de la banlieue) encore solide et buvant sec malgré ses soixante-dix ans, et la mère Bibi qui en avait soixante-