Page:Leroy-Beaulieu, Essai sur la répartition des richesses, 1881.djvu/232

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en tout un peu plus de 4 millions de francs, ou 4,317 francs par maison. D’après ces chiffres on voit que, si le gouvernement réduisait à 1/2 p. 100 les droits de vente, une maison ouvrière pourrait ne coûter que 6,000 francs dans la banlieue de Paris, tout en étant fort confortable. Les 945 maisons créées par la société de Mulhouse ont été achetées par des ouvriers, et on calcule que le quart environ de la population ouvrière de cette ville s’y trouve logé. En vingt-trois ans les ouvriers de Mulhouse ont employé 3 millions 319,000 francs en achats d’immeubles, 130,000 francs par an.

Cet exemple a été imité à Guebwiller et à Colmar avec un peu moins de succès. À la fabrique de produits chimiques de Thann le propriétaire, M. Scheurer-Kestner, fait aux ouvriers des prêts pour achats de maisons, si bien que parmi les 333 travailleurs de l’usine 103 sont devenus propriétaires de leur habitation.

Avec le taux actuel des salaires qui atteint dans certains corps d’état 7 ou 8 francs par jour, il ne serait pas impossible que les ouvriers d’élite arrivassent à posséder des maisons d’une importance même bien supérieure à celle que nous venons de décrire, des habitations, par exemple, valant 7, 8 ou 10,000 francs, et ayant des jardins de 4 ou 500 mètres. L’ouvrier français serait alors logé comme l’ouvrier américain[1].

L’État et les villes, en dehors des mesures que nous avons indiquées et qui sont de leur devoir absolu, ne peuvent-ils pas faire davantage encore ? Peut-être. L’État et les grandes villes ont un crédit particulièrement élevé, ils empruntent à 3,60 p. 100, à 4 p. 100 amortissement compris dans un délai de cinquante ou soixante ans. Ils pourraient mettre ce crédit à la disposition des sociétés qui veulent construire des maisons ouvrières. Ce serait diminuer d’autant le coût du loyer, sans que les contribuables en souffrissent le moins du monde ce ne seraient pas là des subventions, ce qui prêterait à la critique, ce seraient des avances remboursables sans perte pour le Trésor.

  1. On peut consulter sur Les habitations économiques l’ouvrage de MM. Müller et Cacheux.