Page:Les Aventures de Huck Finn.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

déjà prête à déserter. Enfin, toujours guidé par Tom, on arriva, en se faufilant à travers une autre fente que personne n’avait remarquée, dans la grande cave où nous avions découvert le trésor.

— C’est ici le repaire où nous établirons notre quartier général, dit Tom.

La vue du repaire, dont les murs étaient humides et où les sièges manquaient, n’excita pas autant d’enthousiasme que je m’y attendais. Tom s’en aperçut sans doute, car il reprit aussitôt :

— On ne se réunira ici que dans les grandes occasions ; l’été, nous camperons dans le bois voisin.

— Tant mieux, dit Joe Harper ; la cachette est bonne ; mais il faut s’écorcher les genoux et les coudes pour y arriver. Mon pantalon est tout déchiré.

— Bah ! répliqua Tom, on croira que tu as grimpé à un arbre. Du reste, s’il y a des capons parmi nous, ils sont libres de s’en aller, puisqu’ils n’ont pas encore prêté serment. Que les capons lèvent la main.

Aucune main ne se leva.

— À la bonne heure ! s’écria Tom. Je vois que j’ai bien choisi mes hommes et que je puis compter sur eux. Maintenant, je vais vous lire le serment, et vous le signerez de votre sang.

Il tira de sa poche une feuille de papier sur laquelle il avait écrit le serment. Les membres de la bande juraient d’obéir aux ordres du capitaine et de se soutenir les uns les autres. Si quelqu’un révélait les secrets de la bande, on tirerait au sort pour savoir qui le tuerait, et le justicier désigné s’engageait à ne pas manger ou dormir jusqu’à ce qu’il eût plongé son poignard dans le cœur du coupable et tracé une croix sur sa poitrine. Cette croix était la marque de la bande de Tom Sawyer, qui, seule, avait le droit de s’en servir. Si un des affiliés se révoltait contre le capitaine, il passerait devant un conseil de guerre et on lui brûlerait la cervelle séance tenante. Il y en avait beaucoup plus long ; mais je ne me rappelle pas le reste.