Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/161

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


CHAPITRE V




Comment on peut à l’élévation de l’esprit unir le soin de ses affaires.

Les choses en elles-mêmes sont indifférentes, mais l’usage que nous en faisons n’est pas indifférent. Comment donc tout à la fois maintenir son âme dans la tranquillité et dans le calme, et faire avec soin ce que l’on fait, sans précipitation comme sans lenteur ? On n’a qu’à imiter ceux qui jouent aux dés. Indifférents sont les points ; indifférents les dés. Comment savoir, en effet, le dé qui va venir ? Mais jouer avec attention et avec habileté le dé qui est venu, voilà ce qui est mon affaire. De même dans la vie ce qu’il y a d’essentiel, c’est de distinguer, c’est de diviser, c’est de se dire : « Les choses extérieures ne sont pas à moi, mais ma faculté de juger et de vouloir est à moi. Où donc chercherai-je le bien et le mal ? Au-dedans de moi, dans ce qui est à moi. » Ne dis jamais des choses extérieures qu’elles sont bonnes ou mauvaises, utiles ou nuisibles, ni quoique ce soit en ce genre.

Quoi donc ! devons-nous y mettre de la négligence ? Non pas, car d’autre part la négligence est un mal pour notre faculté de juger et de vouloir ; et par conséquent elle est contraire à la nature ; mais il faut tout à la fois y mettre du soin, parce que notre conduite n’est pas indifférente, et garder notre calme avec