Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/259

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là Hector pour tirer l’épée contre le roi? Et toi, mon cher, oublieras-tu ton rôle de roi,

Toi à qui les peuples sont confiés, à qui tant d’intérêts sont remis;

et te disputeras-tu pour une femme avec le plus vaillant de tes alliés, que tu devrais entourer de toute sorte d’attentions et d’égards? Seras-tu au-dessous de l’habile grand-prêtre, qui a toute espèce de soins pour les grands guerriers? » Vois-tu ce que peut produire l’ignorance de ce qui est vraiment utile?

— Mais, moi (dis-tu), je suis riche! — Es-tu donc plus riche qu’Agamemnon? — Mais, moi, je suis beau! — Es-tu donc plus beau qu’Achille? — J’ai de plus une chevelure magnifique! — Est-ce qu’Achille n’en avait pas une plus belle encore, et une blonde? Et il ne la peignait ni ne l’arrangeait avec élégance! — Mais, de plus, je suis fort! — Peux-tu donc sou lever une pierre telle que celle que soulevait Hector ou Ajax? — Mais, de plus, je suis de noble race! — As-tu donc une déesse pour mère? As-tu pour père un fils de Jupiter? Et de quoi tout cela servait-il à Achille, quand il était assis à pleurer pour une femme? — Mais je suis orateur! — Est-ce qu’il ne l’était pas lui aussi? Ne sais-tu pas comment il s’est tiré d’affaire avec les plus habiles parleurs de la Grèce, Ulysse et Phénix? Comment il les a réduits au silence?

Voilà tout ce que je puis te dire, et encore sans plaisir. Pourquoi? parce que tu ne m’as pas inspiré. Que puis-je en effet regarder en toi qui m’excite, comme la vue d’un cheval de bonne race excite un écuyer? Ton corps? Mais tu en as soin d’une fa-