Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/32

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lités de son œuvre, il laisse trop souvent échapper l’enchaînement des idées, et n’a pas de l’ensemble du système une intelligence suffisante pour donner à chaque expression sa valeur vraie. Sa traduction peut être celle d’un Helléniste; elle n’est pas celle d’un philosophe. Voilà pourquoi nous avons cru pouvoir publier la nôtre après la sienne.

Traduire un philosophe ancien, c’est le commenter, sans en avoir l’air. Pour qui a suivi l’histoire intellectuelle de l’humanité, et la marche naturelle des idées dans les peuples comme dans les individus; pour qui a observé comment elles se forment et se transforment; pour qui les a vues passant petit à petit de la synthèse à l’analyse, d’une extension énorme d’abord à une extension de plus en plus restreinte, de l’indétermination et du vague à une précision de plus en plus grande, il est bien clair que les idées des anciens étaient autrement faites que les nôtres et se composaient d’autres éléments. Lors donc que nous prétendons traduire une de leurs idées par une idée équivalente prise dans les nôtres, lorsque nous croyons qu’un de nos mots répond exactement à un des leurs, nous nous trompons le plus souvent: nous sommes presque toujours en deçà ou au-delà de leur conception exacte. On a dit, avec raison, que la plupart de nos erreurs sur les usages et sur les opinions de l’antiquité étaient des erreurs de dictionnaire; et que bon nombre