Page:Les Entretiens d’Épictète recueillis par Arrien.djvu/344

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aux attaques. Voyez Diogène; quelqu’un lui disait: « Es-tu ce Diogène qui ne croit pas aux dieux? »

— « Comment n’y croirais-je pas, répondit-il, puisque je crois que tu es l’ennemi des dieux? » Une autre fois Alexandre, qui le trouvait endormi, lui dit ce vers:

« Il ne faut pas que l’homme qui doit donner des conseils, dorme toute la nuit. »

A moitié endormi, il répondit par cet autre:

« Lui, à qui les peuples ont été confiés, et qui s’occupe de si grandes choses[1]. »

Avant tout, il faut que sa partie maîtresse soit plus pure que le soleil; autrement, il ne serait qu’un brelandier et qu’une pratique, lui qui se ferait le censeur des autres, quand le mal serait maître chez lui. Vois, en effet, l’état des choses. Les rois et les tyrans ont des gardes et des armes, qui leur donnent les moyens de réprimander les autres et de les punir quand ils font mal, quelque pervers qu’ils soient eux-mêmes; mais le Cynique n’a ni armes ni gardes: il n’y a que sa conscience qui puisse lui donner ce même pouvoir. Quand il se voit veillant et travaillant par amour pour l’humanité; quand il se voit s’endormant le cœur pur et se réveillant plus pur encore; quand il voit que toutes ses pensées sont les pensées d’un ami des Dieux, d’un de leurs ministres, d’un associé à la souveraineté de Jupiter; quand il voit que partout il a présent à l’esprit ce mot:

« O Jupiter, o destinée, conduisez-moi; » et cet autre encore:

  1. Ce vers, dans Homère, fait suite au précédent. Iliade, ch. 3, vers 24 et 25.