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LES MILLE ET UNE NUITS,

cepter le présent que le prince de Perse lui faisoit ; mais quoiqu’il lui représentât que Schemselnihar lui avoit déjà envoyé plus qu’il n’en avoit besoin pour remplacer ce que ses amis avoient perdu, il voulut néanmoins être obéi. Le joaillier fut donc obligé de lui témoigner combien il étoit confus de sa libéralité, et il lui marqua qu’il ne pouvoit assez l’en remercier. Il vouloit prendre congé ; mais le prince le pria de rester, et ils s’entretinrent une bonne partie de la nuit.

Le lendemain matin, le joaillier vit encore le prince avant de se retirer, et le prince le fit asseoir près de lui. « Vous savez, lui dit-il, que l’on a un but en toutes choses : le but d’un amant est de posséder ce qu’il aime sans obstacle ; s’il perd une fois cette espérance, il est certain qu’il ne doit plus penser à vivre. Vous comprenez bien que c’est là la triste situation où je me trouve. En effet, dans le temps que par deux fois je me crois au comble de mes désirs, c’est alors que je suis arraché d’auprès de ce que j’aime,