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CONTES ARABES.

elle me raconta le marché qu’elle en avoit fait, comme une chose en quoi elle croyait avoir beaucoup gagné.

» Ah, femme infortunée, m’écriai-je, vous ignorez le mal que vous nous avez fait, à moi, à vous-même et à vos enfans, en faisant un marché qui nous perd sans ressource ! Vous avez cru ne vendre que du son, et avec ce son, vous avez enrichi votre vendeur de terre à décrasser de cent quatre-vingt-dix pièces d’or, dont Saadi, accompagné de son ami, venoit de me faire présent pour la seconde fois. »

» Il s’en fallut peu que ma femme ne se désespérât quand elle eut appris la grande faute qu’elle avoit commise par ignorance. Elle se lamenta, se frappa la poitrine, s’arracha les cheveux, et déchirant l’habit dont elle étoit revêtue : « Malheureuse que je suis, s’écria-t-elle, suis-je digne de vivre après une méprise si cruelle ? Ou chercherai-je ce vendeur de terre ? Je ne le connois pas ; il n’a passé par