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LES MILLE ET UNE NUITS,

appétit, il s’abandonna aux plaisirs de la table, but plus qu’il n’avoit coutume, et se laissa presqu’aussitôt aller au sommeil.

» Le jeune favori voyant son maître dans cet état et mal accompagné, craignit pour la sûreté de sa personne. Il voulut passer la nuit devant sa tente et lui servir de garde. Sur-le-champ il se lève, tire son épée, et se met en sentinelle devant la tente du roi. Un des pages, jaloux depuis long-temps de sa faveur et de la confiance que le roi avoit en lui, le voyant ainsi l’épée à la main, lui demanda ce qu’il faisoit là à l’heure qu’il étoit, et au milieu d’une campagne aussi tranquille. « Je veille, répondit-il, à la sûreté du roi. Ses bontés à mon égard me font un devoir de craindre pour lui, lors même qu’il paroît n’y avoir rien à craindre. »

» Le lendemain matin le page raconta à plusieurs de ses camarades l’action du favori : elle augmenta leur haine, et ils crurent avoir trouvé l’occasion de le perdre et de se débar-