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LES RAVAGEURS

la petite bête jaune en se détendant comme un ressort et frappant à la fois le sol de son corselet et de ses élytres, toc ! L’insecte rebondit et s’élance en l’air à deux pans au-dessus du carabe. Il retombe sur le dos. Une seconde fois, toc ! Il est sauvé, le carabe ne l’a pas vu retomber. — Oh ! comme il avait ri, le petit Émile, du désappointement du féroce carabe quand l’insecte disparaissait soudain. On rit toujours d’un malintentionné qui manque son coup. Le sauteur et le chasseur furent recueillis et apportés à l’oncle, qui raconta ceci.

Paul. — La vulgaire jardinière, connue de tous, se nomme le carabe doré. C’est un magnifique insecte d’un pouce environ de longueur. Le dessus du corps est d’un vert métallique, avec les reflets de l’or ; le dessous est noirâtre. Les élytres, gracieusement allongées en ovale, emboîtent bien le ventre et lui forment une solide cuirasse qui ne s’ouvre jamais, car au-dessous il n’y a pas d’ailes membraneuses. Le carabe court rapidement sur ses longues jambes, mais il ne peut voler. Il se nourrit de proie vivante, limaces, escargots, vers de terre, larves, insectes, chenilles, qu’il cherche dans tous les coins et recoins et qu’il éventre avec ses robustes mandibules. Regardez-les, ces meurtrières armes : comme elles sont longues et pointues, recourbées en crocs qui se croisent à la façon des lames de ciseaux. Comme on voit qu’elles sont faites pour taillader les chairs !

Émile. — C’est avec ses mandibules qu’il avait ouvert le hanneton, dont les entrailles traînaient à terre ?

Paul. — Certainement. Peu d’insectes résistent