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BALANINS ET ANTHONOMES

Une semaine après, la larve est éclose. Le petit ver se met à ronger tout aussitôt la fleur, ne respectant que l’enveloppe extérieure. Il va de soi que le bouton dont le cœur est mangé ne peut s’épanouir et que la fleur est perdue ainsi que le fruit en germe. Les boutons, rongés au dedans seulement, conservent leur forme et prennent en se desséchant l’aspect de clous de girofle.

Émile. — De ces clous de girofle que mère Ambroisine met dans les ragoûts ?

Paul. — Justement.

Émile. — Ces clous de girofle, que sont-ils ?

Paul. — Ce sont des boutons ou fleurs non épanouies du giroflier, arbuste aromatique des pays chauds. On les recueille avant leur épanouissement, puis on les fait sécher au soleil.

Émile. — Je vois pourquoi les boutons piqués par l’anthonome prennent l’apparence de clous de girofle. Dans les deux cas, ce sont des fleurs desséchées avant d’être épanouies.

Paul. — La larve de l’anthonome est, comme pour les charançons en général, un petit ver sans pattes, de couleur blanche. Elle n’abandonne pas le bouton rongé, quand celui-ci se détache de l’arbre. La larve du balanin quitte la noisette en perçant la coque d’un trou, celle du rhynchite conique abandonne la pousse tombée, celle du rhynchite de la vigne se laisse choir de son rouleau de feuilles ; toutes les trois s’enfoncent dans la terre pour y passer l’hiver en sûreté et s’y métamorphoser au printemps suivant. La larve de l’anthonome est plus expéditive : elle se métamorphose dès qu’elle a mangé sa fleur.