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LES RAVAGEURS

se débarrassant de la mère, on fait périr dans leur germe un cent de chenilles peut-être.

Émile. — Est-ce que le papillon ne prend pas la fuite quand on veut le saisir sur l’écorce d’un arbre ? J’ai bien de la peine à prendre ceux qui volent dans le jardin. Lorsque j’en vois un posé sur une fleur, je m’approche doucement, bien doucement, j’avance la main, mais pst ! le papillon s’en va.

Paul. — On prend la zeuzère sans difficulté ; la pauvre mère a le vol lourd, et puis elle est trop préoccupée du soin de ses œufs pour songer à prendre la fuite.

Jules. — Ah ! si j’avais su ces choses, comme j’aurais fait bonne garde autour de mon lilas ! Vienne le mois de juillet, et vous verrez.

Paul. — Chaque espèce d’insectes, vous disais-je, dépose ses œufs, avec une admirable prévoyance, en des lieux où les jeunes aient des vivres assurés. Le petit être qui sort de l’œuf est une larve, un débile vermisseau, qui, le plus souvent, doit seul se tirer d’affaire, se procurer à ses risques et périls le vivre et le couvert, chose difficile en ce monde. En ses pénibles débuts, il ne peut attendre aucune aide de sa mère, morte le plus souvent ; car, chez les insectes, les parents meurent en général avant l’éclosion des œufs d’où proviendront les fils.

Sans tarder, la petite larve se met au travail. Elle mange. C’est son unique affaire, affaire grave, d’où dépend l’avenir. Elle mange, non simplement pour soutenir ses forces au jour le jour, mais surtout pour acquérir l’embonpoint nécessité par la future métamorphose. Il faut vous dire, et ceci vous étonnera