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LES RAVAGEURS

tées. D’autres fois on dépose sur le tas de froment des plantes aromatiques, dont l’odeur fait fuir les insectes. Mais ces moyens n’ont pas une efficacité complète ; s’ils font déménager les insectes parfaits, ils laissent dans le tas les œufs, les larves, les nymphes, et c’est toujours à recommencer. Le remède par excellence serait de tout détruire à la fois, sans nuire au blé. Je vais vous montrer comment.

L’oncle déboucha la bouteille et versa dans le verre un petit travers de doigt du liquide.

Émile. — Ouf ! quelle puanteur ! Bien certainement ce n’est pas de l’eau claire, cela sent trop mauvais.

Jules. — C’est l’infection des choux gâtés. Ferait-on cette drogue avec des choux pourris ?

Paul. — Non, mon ami, bien qu’elle en ait l’odeur. On la fabrique avec du soufre et du charbon. Son nom est sulfure de carbone. J’en verse une goutte sur du papier. Il se produit, vous le voyez, une tache transparente comme celle de l’huile ; mais dans un instant elle s’efface et le papier reprend son premier aspect. Le liquide alors est parti, il s’est dissipé dans l’air en vapeur invisible. Le sulfure de carbone est donc remarquable par la rapidité avec laquelle il s’évapore. Il suffit de souffler un instant sur une mince couche de ce liquide pour la faire disparaître. Les vapeurs répandues dans l’air ne se voient pas, mais on les sent fort bien.

Jules. — On ne les sent que trop ; à dix pas du verre, elles infectent.

Paul. — Sortons dans le jardin ; j’ai autre chose à vous montrer.